Il m'a contacté sur Youtube en réaction à une vidéo de notre Secrétaire Général qui s'exprimait à Andrézieux-Bouthéon, après que nous ayons envahi le Centre de contrôle de la Recherche d'Emploi (CRE), à propos des radiations, de la chasse ouverte contre le chômeur.

 

Tennessee Garcia l'a vue venir avant nous, parce qu'il était aux premières loges pour entendre nos décideurs épancher ouvertement leur racisme social en guise de caution à leurs plans très agressifs et culpabilisateurs.

Nous, comme d'habitude, on avait la tête ailleurs, la Sociale, le grand bateau construit sur les charniers de nos aînés, depuis la Commune jusqu'à Croizat en passant par le Conseil National de la Résistance, les deux hécatombes mondiales et une multitude de luttes ouvrières, prend l'eau de toutes parts, on court partout : du Droit au Logement au Droit du Travail en passant par la Santé, les voyants sont tous rouges vif ce qui n'est pas bon signe, même pour nous.

 

Donc Sylvain fut radié de la liste des demandeurs d'emploi quelques jours avant moi, le 24 juin, pour une période d'un mois. Il me contacta immédiatement, nous écrivîmes une lettre de recours qu'il fit rapidement parvenir au service concerné, puis … Rien.

 

Chez moi les camarades se sont mobilisés et nous avons envahi mon pôle-emploi, le jour même du Comité Départemental de Liaison, à cinq kilomètres de là.

C'était simplement magnifique. Et certains conseillers dansaient au son de la CGT. J'ai tout de suite été rétabli dans mes droits, en ne justifiant rien du tout.

Comment justifier que je n'ai pas pu répondre au téléphone à 9h03 ? En quoi consiste cet entretien téléphonique ? Est-il utile à moi ou au Pôle-emploi, à mon évolution professionnelle ou à l'évolution des chiffres du chômage ?

 

Bon, c'était chez moi, 69120, Vaulx-en-Velin, alors que lui, Sylvain, 45000, Orléans, a vécu les choses plutôt comme ça :

Il reçoit chez lui un questionnaire venu de la plateforme de contrôle de Tours, le premier CRE mis en activité en France. Il vient de s'inscrire à Activ'Emploi, la veille justement, et s'est rendu à plusieurs forums pour l'emploi pour lesquels Pôle-emploi envoie des convocations en forme d'invitation (vous êtes obligé d'y aller même s'ils ne peuvent pas vraiment vérifier votre passage ou non). Il a déposé beaucoup de CV pour lesquels il n'a reçu aucune réponse.

C'est bien mais ça manque un peu d'activité, de pep's, cette recherche d'emploi, donc le Centre de contrôle lui passe un petit coup de fil pour lui demander une preuve qu'il a postulé dernièrement en intérim. Là, y a du boulot.

Immédiatement, Sylvain postule à trois offres d'emploi en intérim puis leur fait parvenir les justificatifs. Mais ces candidatures là aussi, elles manquent de pep's, elles ne sentent pas trop le dynamisme. A croire que d'avoir sa mère en Ehpad ça l'empêche de se concentrer sur sa recherche « active » d'emploi !

Donc, ni une ni deux, c'est la punition, la tape sur les doigts, mon pote Sylvain tu mangeras pas en août !

 

De la Précarité, certes, de la Précarité Active avant toute chose ! C'est important.

Pour mériter une Allocation de Solidarité Spécifique de 511€ par mois.

Et puis, ils sont mignons ces bougres mollassons, incapables de courir d'un côté de la rue à l'autre pour chercher du boulot (c'est compliqué de payer l'entretien d'une voiture), incapables de voler des téléphones ou de passer toutes leurs matinées à Pôle-emploi pour contacter des employeurs imaginaires, ils vont ensuite se plaindre benoîtement à leur conseillère Activ'Emploi qui prend son air le plus triste pour répondre :

« Non, je suis désolée, je peux rien faire, nous on est des prestataires privés »

Des prestataires qui ont le pouvoir de provoquer une radiation mais aucunement de l'empêcher, pour exprimer les choses clairement.

 

A l'agence Pôle-emploi, on se cache derrière la possibilité du recours. Non suspensif, le recours, tandis que la sanction ne dure qu'un mois.

Ils examinent le recours pendant que vous êtes privé de vos ressources (dans le meilleur des cas) puis statuent tranquillement, à tête reposée, devant les mots « incessible et insaisissable » accolés dans la loi à la définition de l'Allocation Spécifique de Solidarité, en se grattant la tête pour trouver comment contourner leur sens.

 

En attendant la réponse à sa demande de recours, Sylvain s'est ré-inscrit et sera indemnisé pour la période du 24/07 au 31/07.

133€ à venir le lundi 5 août, normalement... En attendant les 511€ du 5 septembre.

 

La CGT du Loiret (45) partie en vacances, nous n'avons personne sur place pour qu'il puisse aller réclamer ses droits comme je l'ai fait. On verra à la rentrée.

 

A la base, en tout premier, cette cagnotte est créée pour lui, afin de l'aider, lui permettre de tenir le coup avant l'arrivée des renforts.

Parce que … on les connaît ces galères. Et la pression qu'elles peuvent mettre, comme d'aller bouffer au Secours Populaire, pleurnicher dans les bureaux du CCAS, taxer les cigarettes et fumer les mégots … en craignant toujours que ton propriétaire signale l'impayé à la CAF qui pourrait te radier à son tour.

 

On a vite fait de craquer … et de se remettre au boulot ?

 

A tout ce que j'ai décrit il faut ajouter le plat de pâtes qui dure trois jours. Heureusement, le Précaire ne fait qu'un seul vrai repas et se lasse donc un peu moins vite. La faim y aide beaucoup.

 

Le problème c'est que les employeurs ne trouvent pas de main d’œuvre. Les pauvres.

Ils ne fournissent rien, ni les moyens de transport ni les équipements en général, proposent des contrats courts, sans évolution possible, sans valorisation du salarié, le tout à un tarif minimum ou en-dessous …

Mais nous sommes censés être actifs, courir en bus puis en métro, voyager deux heures, bosser quatre heures, ne surtout rien réclamer et dire merci. Avec dynamisme.

Pour des employeurs qui sont de moins en moins soumis à la Loi. Combien d'employés LS aujourd'hui travaillent sans chaussures de sécurité et manipulent tous les jours des dizaines de palettes ? Ce n'est que le sommet de l'iceberg.

Combien d'intérimaires morts ou blessés cette année ?

Le chômage c'est de la faute des chômeurs … ils ne veulent pas travailler ?

Que sont-ils alors ? Des grévistes ?

 

Je m'égare même si, en ces temps troublés, nous n'avons jamais mieux mérité qu'aujourd'hui … ou demain, plutôt, ce qualificatif de « chômeurs rebelles ».

 

Le principe de la cagnotte est simple, vous donnez et le montant s'affiche en direct.

On peut effectuer des retraits par virements, l'objectif sera donc de virer l'argent sur le compte de notre camarade dès qu'une certaine somme sera atteinte. Il faudrait pouvoir lui verser quelque chose aux alentours du 15 août pour bien faire.

 

La cagnotte sera sous le contrôle du comité des privés d'emploi de Vaulx-en-Velin.

En clair, je transmettrai tous les justificatifs à la CE de l'Union locale CGT et aux privés d'emploi et à tous ceux qui en feront la demande. Copie des virements et copie des justificatifs de situation de la personne concernée.

 

Ensuite la cagnotte continuera d'exister selon les termes de son descriptif et son montant sera disponible pour tous les comités qui en auront besoin, sous mode de virement aux personnes dont ils transmettront les coordonnées.

On verra collectivement au cas par cas et selon les sommes collectées. En tout cas, je compte sur mes camarades pour exiger un maximum de transparence et se saisir avec bienveillance de tous les moyens de contrôle possibles afin de rester, ensemble, fidèles à l'objectif initial.

Les dérives surviennent dès qu'on reste seul ou enfermé dans un petit groupe. Chacun doit s'intéresser aux affaires de tous.

 

Merci d'avance pour vos témoignages de solidarité …

pour toujours pour que l'Union nous rende forts (« Solidarity forever for the Union makes us strong », chant célèbre des International Workers of the World) !

Et on se tient au courant de la suite.

Nico, chômeur de Vaulx

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